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Actualité culturelle - Page 2

  • Kery James ou l'équilibre retrouvé


    On s’en fout de tes conditions, on n’a pas les mêmes ambitions
    Tu veux du rap sans opinions, sans prise de position
    Voilà le son de la révolution : conscient, violent mais puissant
    Fais pas le gangster, y suffit pas d’être vulgaire
    On fait du vrai peura…



    Kery James est venu ranimer les cendres du rap français (Je suis venu récupérer le trône ; dites-leur que le fauve est de retour dans la faune), renvoyant dos à dos ceux qui, depuis quelques années déjà, font du rap d’adolescents, encouragés en cela par des maisons de disques aux intentions quelques peu douteuses.

    Avec Kilomaître à la production, on sent, à l’écoute de cet album, qu’il a travaillé d’arrache pied sur ce projet pour arriver à réunir ses deux publics : les puristes du rap des premières heures qui avaient aimé « le combat continue » d’ Idéal J, et ceux plus intéressés par sa conversion à l’Islam qui remonte à cinq ans et son discours de repenti. Ainsi, on ne trouvera qu’une seule référence à l’Islam dans les 17 chansons, qu’il met à l’abri d’hypothétiques comportements violents (et si je deviens violent, l'Islam n'y ai pour rien, ce n'est d^qu'à mes faiblesses).


    Présent depuis plus de 15 ans en tant que MC, Kery n’a jusqu’à maintenant, auprès des publics, qu’un succès d’estime, qu’il compte bien transformer en reconnaissance publique. Des titres comme « banlieusards », « l’impasse », « X&Y » ou « à l’ombre du show business » avec charles Aznavour montrent le regard lucide qu’il porte sur les jeunes de banlieues : il dénonce l’impasse des activités illicites (l’illicite n’est qu’un mirage dans le désert du Ghetto) tant en prônant l’élévation et la valorisation par l’étude et la volonté de réussir là où les anciens (les parents) n’ont pu percer.
    Tout en montrant qu’il reste dans le « game » (c’est le retour du King, comme Ali face à Foreman) pour la place de meilleur MC français (« egotrip », « le combat continue part 3»), Kery James se fait l’un des haut-parleurs de la banlieue ( La banlieue a une voix, je ne suis qu’un de ses hauts-parleurs) et vient rappeler l’ingratitude et l’absence de reconnaissance dont font mine les médias, devant la place qu’a prise le rap au sein de toute une jeunesse de France.

     

    Ce qu’il faudra retenir de l’homme ? Générosité (pas moins de 17 titres à un prix modique), ouverture d’esprit (l’album prend des teintes dancehall, soul, R&B, avec des collaborations de Grand corps malade, Kayna Samet, Chauncey, Black Vner, Dry, Vitaa ou encore J.M Cissoko et Charles Aznavour), effort vers l’objectivité et lucidité (Il ne dénonce ni ne moralise mais énonce les faits avec authenticité), performance artistique (Je rappe hardcore, cru, sans être vulgaire / ça fait 16 ans que je déchire sur le microphone / le constat c’est que Kery James ne rappe comme personne) ainsi qu’un certain sens de l’harmonie. L’album sonne un peu comme un classique du rap français, reste à savoir si la reconnaissance publique suivra.


    Quoi qu’il en soit, c’est une joie pour tout amateur de rap de le retrouver réconcilié avec son coté social plus qu'engagé. Cela montre qu’il n’oublie pas d’où il vient, même s’il lui est arrivé de renier certains actes passés, et donne une touche somme toute plus humaine : celle d’un homme pris dans l ‘étau de ses contradictions et paradoxes (t’imagines pas comme je suis torturé, tiraillé entre deux moi, d’émotions saturé / dans un monde où même l’amour se fait facturer, j’ai du plâtrer ma confiance, j’ai le cœur fracturé...). Cet album n’est qu’un instantané d’un homme au parcours atypique dans le rap français et tout jugement ne peu se faire qu’à l’aune d’un parcours parsemé de doutes, d’embûches, d’échecs ou de réussites ( et même si l’espoir se fane, je continuerai à chanter mes joies, mes larmes, ma vie, ma peau, parce qu’on vient du ghetto…).


    Kery James est de retour avec cet album (à l’ombre du Show Business) qui place la barre très haut artistiquement parlant. Mais 2008 est une année charnière qui voit le retour au premier plan des MC’s de la première heure. Avant les très attendus albums de la Scred Connexion, de Médine (Arabian Panther) et de Rockin Squat (confessions d’un enfant du siècle), les paris restent ouverts à qui remportera la place d’estime revenant au meilleur MC’s français...A suivre, donc.

     

     

  • Cinquième soleil

     

    Au-delà des classes sociales, le vécu singulier rassemble autour d'une vision commune.

    Ceux qui ont été humiliés dans leur coeur, les coutumiers de la souffrance,

    Tous se retrouvent avec un Amour qui n'a pas encore de Nom, diffus...,

    et ce même besoin ou envie de donner, pour la postérité, afin de faire la nique aux murailles.

    La Parole n'a pas d'âge. Quand elle s'exprime et touche, elle provient d'une Ame.

    Pour ceux qui savent l'écouter, sans mettre de mots, elle force le respect.

    Ici même ne comptent ni le bagage, ni le langage, ni ce qui a été bâti.

    La force de l'âge n'est qu'un critère humain pour définir celui qui est sage.

    A l'ombre du Show-business se dressent d'authentiques éveillés sans aucun maître,

    et c'est le monde qui reste sans voix face à tant d'imprévu :

    ces nouveaux venus qui déroutent des plans depuis longtemps établis.

     

     

  • Saint Judas, le retour

     Il ne sera point question ici de présenter l’aspect ténébreux de l’apôtre. Les qualificatifs négatifs dont il a été affublé à travers les siècles (félon, traître, assassin…) sont légion et la balance qui pèse son âme, malheureusement, ne penche, en tout cas sur terre, que d’un côté, le mauvais, faute de circonstances atténuantes.

    Il ne sera pas question non plus de réhabiliter le Saint homme car, étonnamment, une force contradictoire et révisionnelle est à l’œuvre, depuis quelques décénies, représentant Judas sous un nouveau jour, sous un nouvel angle. Il est à noter que Marie-Madeleine jouit, elle aussi, d’une métamorphose de son image dans la conscience collective. 

    Je relaterais donc, pour le lecteur désireux de se faire sa propre opinion, quelques pistes de réflexion.

      Il aura fallu attendre Quelque 2000 ans pour que le procès sans appel du « treizième » apôtre de Jésus soit de nouveau ouvert.C’est Gurdjieff (mort en 1950) qui le premier donna un point de vue intéressant (car différent) sur Judas. Dans son roman fleuve (Belzébuth), à la fin du chapitre sur la religion (p.711), il évoque le rôle salvateur de l’apôtre :  Le Christ sait que son arrestation est imminente, qu’il est destiné à mourir sur la croix, mais n’a pas « eu le temps d’expliquer à ses disciples certaines vérités cosmiques, ni de leur donner les instructions nécessaires pour l’avenir ». Judas se dévoue pour faire diversion et laisser à Jésus le temps nécessaire pour l’accomplissement d’un « mystère sacré » (proche de l’eucharistie actuelle) bien connu des grands initiés, afin de pouvoir rester en contact pendant quelque temps après sa mort avec les disciples (on parlerait aujourd’hui de communication astrale).

    Pour Gurdjieff, la représentation de Judas comme traître dans les saintes écritures serait dû à la volonté d’un apôtre de minimiser l’importance de J.C ; en le représentant comme « naïf, imparfait et incapable de pressentir, malgré toutes ces années vécues auprès de Judas, sa future perfidie ».

    Et Gurdjieff de rétablir le premier (à ma connaissance) l’importance de Judas : « non seulement le plus fidèle, le plus dévoué et le plus proche de J.C ; mais aussi celui qui, par son intelligence, son ingéniosité et sa présence d’esprit, permirent à Jésus d’accomplir tous les actes dont le résultat alimenta et inspira, pendant de nombreux siècles, le psychisme de la plupart des être humains, et rendit leur existence à peu prêt supportable ».

    Où Gurdjieff avait-il puisé ces informations ? Avait-il en sa possession l’évangile de Judas redécouvert par le plus grand des hasards quelque 40 ans après sa mort ?

    C’est cette question que se posa également émile Gillabert, un chercheur gnostique lui aussi décédé il y a peu, et à qui l’on doit notamment une transcription lumineuse de l’ « évangile de Thomas ». L’hypothèse qu’il défend est que Didyme jude Thomas, littéralement le « jumeau », n’était autre que Judas lui-même, ce qui l’amenera à écrire un livre entier sur l’identité véritable de ce dernier et le contenu ésotérique de son évangile, qui dénote un caractère hautement initiatique (comme le sera l’évangile de Marie-madeleine).

    Puis survint en 2006, à grand renfort d’actions marketing, la sortie de l’ « évangile de Judas ». Ce document n’est pas inédit puisque Saint Irénée, au IIème siècle après J.C, en fait mention dans son livre « contre les hérésies ». Simplement, il est à noter que cet évangile, même s’il est incomplet, failli ne jamais (re)voir le jour, et que sa sortie fut le fruit d’une lutte acharnée de quelques irréductibles pour l’exposer à la vue de tous.

    Nous ne discuterons pas ici de son contenu à forte teneur gnostique. L’intérêt, une nouvelle fois, vient de ce qu’il présente la tâche de Judas comme utile et salvatrice : « Jésus dit à Judas : " Tu surpasseras tous les autres, car tu sacrifieras l'homme qui me sert de vêtement ».

    Dans un passage significatif du recueil, Judas est le seul, à une question posée au préalable par Jésus à ses disciples (« que celui qui est parfait s’avance vers moi »), à s’avancer vers le Maître, sans toutefois oser le regarder dans les yeux. Il montre, par sa réponse et cet acte, qu’il connaît la nature véritable de Jésus, là où les autres s’interrogent encore, et qu’il est l’initié par excellence car sa (re-) connaissance montre qu’il s’abreuve à la même source que son Maître.

    Plus loin, dans un entretien en aparté avec Jésus, ce dernier lui révèle sa destinée future, en lui prédisant de nombreux malheurs et souffrances. Mais au final, il sera élevé pour prix de sa tâche assumée. (Judas demande pour quelle raison, c'est à lui seul que Jésus a parlé. Ce dernier répond qu'il sera le treizième disciple, qu'il sera maudit à travers les générations et qu'il viendra régner sur elles. «Dans les derniers temps, ajoute-t-il, ils maudiront ton ascension vers la génération sainte».)

    Cet évangile vient rappeler que Judas est voué à une mission d’ordre cosmique allant à l’encontre des jugements définitifs et préétablis de longue date.

    Il présente, en outre, les onze autres disciples comme des être immatures, proche parfois de l’infantilisme et en tout cas complètement débordés et presque innocents face à l’importance de l’événement dramatique qui se trame sous leurs yeux. On retrouve par ailleurs ces deux points de vue dans le roman de Jean Ferniot, paru en 1986.

    Dans le foulée, et surfant sur la vague de l’actualité, deux auteurs ont également apportés leur vision du personnage incriminé.  

    Gerald Messadié, romancier, a résolument décidé de prendre parti pour Judas dans son dernier livre. Il relate les derniers jours de la vie de Jésus, sa passion, en insistant sur la connivence de longue date existant entre les deux hommes. Il les représente comme deux amis participant à des cérémonies proches de rituels chamaniques, et partageant leur expérience d’un champignon hallucinogène, leur permettant de communier avec les esprits, et notamment l’esprit de Dieu.

    La crucifixion est alors décrite comme une transe extatique et mystique vécue par Jésus (à qui l’on a pris soin de donner le fameux breuvage avant son élévation sur la croix), à laquelle Judas, de loin, communie en esprit. Le roman relate donc, entre autre, l’expérience d’une fusion d’un humain avec la divinité, au prix de la transcendance de nombreuses souffrances.

     Jean-Yves Leloup, prêtre orthodoxe à qui l’on doit, en autre, des traductions savantes des évangiles de Jean, Marie-Madeleine, Thomas et Philippe, reste lui ferme sur sa position concernant Judas. Le nouvel évangile découvert ne change en rien son point de vue : Judas est un archétype, comme le sont chaque personnage du nouveau testament. Il représente la figure du disciple déçu et trahi en premier lieu par son Maître, en qui il projetait l’espoir d’une révolution terrestre, l’établissement du royaume de Dieu dans ce monde.

    Sa trahison est donc un acte de désespoir mais aussi d’amour non reconnu, qui a aussi sa place dans l’histoire de l’humanité. En tant qu’archétype, Judas est un aspect ombrageux de la personne, non reconnue, non aimée ; sans doute celle qui mérite le plus d’attention et de re-connaissance.

    Pourtant, comme le rappelle Jacques Duquesne dans son dernier roman, Il semble que la stupeur et l’incompréhension eût été de mise chez tous les apôtres sans exception, dès le lendemain de la crucifixion.

    Il les représente comme s’interrogeant sur l’identité véritable du Christ en se remémorant ses paroles de feu. Bien plus, ils scrutent les écritures en vain, car nulle part il n’est fait mention d’un messie crucifié pour le rachat des péchés du monde. Tous sont donc dans l’expectative et le doute concernant la nature de Jésus, à l’exception de la croyance en sa résurrection, et le fruit de leurs premières réflexions constituera le point de départ du Christianisme et le début de la théologie.

     Voilà les faits, les thèses avancées ici et là, en ce qui concerne le mystère Judas. J’ai à ce sujet également une hypothèse dont CHATMAN est la clé. Il Lui appartient désormais de vous la divulguer ou pas.

     

    Pour information, j’ai publié, sous le pseudonyme de Jean-Plume, une courte note intitulée  « le souffle de la Bête », avant la sortie officielle du fameux évangile. Elle me fut inspirée par une courte phrase :

    Jésus dit à Judas : " Tu surpassera tous les autres, car tu sacrifieras l'homme qui me sert de vêtement "

    Voici la note :

    Qu’est-ce à dire ?

    une parole à-venir pour le temps du retour

    une mise à nu, un dévoilement, un découvrement

    le travail d’une vie, d’une non-vie

    le choix d’une non-existence

    une plongée dans l’abîme, le néant

    le pas de la foi, la traversée de la folie, la mort dans la vie

     

      Quelques mois plus tard, une autre note plus explicative venait clarifier ou plutôt donner une direction sur ces propos quelque peu inspirés :

    Le Maitre Intérieur

    Jésus ne jugeait pas selon la loi des hommes : Son jugement était vrai parce qu'Il ne faisait qu'énoncer la parole de Dieu. De nos jours, cette voie de l'effacement ultime de la personne ne séduit plus personne

    L’opinion fait foi et l’on imagine mal se mettre au service de lois qui nous dépassent

    L’ego est roi et l’on cultive partout l’expansion de son domaine, jusqu’à autrui.

    Combien se targuent d’être vivants tout en méconnaissant le mort qui sommeille en eux...

    Une fois celui-ci reconnu, combien lui font réellement honneur en le reconnaissant seul Vivant...

    Une fois cette vérité mise à nu, combien comprennent que leur moi n’est qu’illusion, création de main d’hommes...

    En vérité, rien ne subsistera que ce qui sera passé de ténèbres en lumière.

     

    P.S : Est-il utile de préciser que je crois à La résurrection des corps ?

    Bibliographie :

    Gurdjieff : récits de Bélzebuth à son petit fils

    Emile Gillabert : Judas, traître ou initié

    Evangile de Judas

    Nouveau testament

    G. Messadié : Judas le bien-aimé

    Jean-Yves Leloup : Judas, un homme trahi

    P.E. Dauzat : Judas, de l’évangile à l’holocauste

    Jacques Duquesne : Judas, le deuxième jour

    Jean Ferniot : Saint Judas